Crowdlending et banques : concurrence ou complémentarité ?

crédit participatif

Mis à jour il y a 4 ans

Il est généralement admis de comparer les prêts bancaires et le crowdlending. D’un point de vue juridique, l’apparition du crédit participatif a nécessité la fin du « monopole bancaire ». Pourtant cette opposition directe n’est pas forcément légitime. Le crédit participatif constitue avant tout une nouvelle offre de financement à part entière. Une classe d’actifs émergente située à mi-chemin entre financements bancaires et fonds propres.

Des ordres de grandeur encore différents

Les entreprises françaises ont un encours net de prêts d’environ 1.000 milliards d’euros auprès des banques. Plus de 600 milliards auprès des marchés. A la fin du mois d’août 2019 les entreprises, notamment les PME, ont emprunté 71 milliards d’euros (+7,2%) sur 12 mois auprès de leur banque, un montant inédit.

Par comparaison, le financement alternatif des entreprises françaises s’est élevé à 689Me en 2018 (+30%) selon KPMG. Cela a concerné moins de 4000 projets. A comparer aux 1,7 millions d’entreprises ayant un crédit en cours et au gros tiers du total des PME qui sollicitent un crédit chaque année.

De fait, l’immense majorité des financements par prêt reste encore la chasse gardée des banques. Notamment ceux adossés à des actifs où elles restent très compétitives. Habituées à un coût des ressources quasi-nul, les banques voient cependant leur modèle remis en question par plusieurs éléments. Les taux de dépôt négatifs imposés par la BCE, l’écrasement de la courbe des taux comprimant leurs marges, et les exigences de Bale III leur imposant l’augmentation structurelle du niveau de leurs fonds propres.

 

Des « terrains de jeux » complémentaires

Dans ce contexte, le crédit professionnel participatif a vocation à se développer prioritairement là où les banques ne vont pas facilement, de manière autonome ou en co-financement. En cela, il est complémentaire. Que ce soit pour des raisons de ratios réglementaires, ou de gestion interne des risques, les banques ne peuvent pas satisfaire l’intégralité des demandes. Factuellement, une augmentation en France de 1% de la part de marché du « crowdlending » sur les prêts bancaires, ferait plus que doubler la taille du secteur. Signe du potentiel encore inexploité.

Outre son absence de contraintes de bilan, puisque flexible et rapide, le « crowdlending » s’est notamment développé sur plusieurs thématiques :

L’immobilier

« Bridge » sur des projets de promotion immobilière. Une démarche non dénuée de risque mais rémunérée 10% en moyenne. Financement de « foncières immobilières », au niveau de la holding du groupe, afin de développer globalement un portefeuille d’actifs locatifs diversifiés.

La sortie d’actionnaires minoritaires

Les banques sont souvent réticentes à financer des opérations de « cash-out ». Le crowdlending est une solution particulièrement adaptée pour « déboucler » des tours de tables issus des feus « financements ISF».

Le Financement de BFR

Par exemple, lorsque le portefeuille de créances est insuffisamment financé via les factors, avec l’avantage d’une gestion beaucoup plus souple du financement. Ou bien le financement de la croissance et du démarrage d’exploitation suite à l’achat ou à la création d’un fonds de commerce.

« Lease-back » (cession-bail)

Un segment peu couvert par les banques et la BPI. Cela permet de céder des actifs pour un devenir locataire, et ainsi optimiser la gestion de sa trésorerie.

Le « crowdlending » : une classe d’actifs émergente, à mis chemin entre fonds propres et les banques

Les banques conservent un rôle central pour le financement des PME. Celui-ci reste un jeu d’offre et de demande entre une entreprise à la recherche de financement et des investisseurs/prêteurs en quête de rendement. Dans un contexte de taux négatifs, le crowdlending et à même d’attirer de plus en plus de particuliers et d’institutionnels.

Entreprises et prêteurs n’ont par ailleurs pas de « pistolet sur la tempe ». Si le crowdlending se développe en tant que classe d’actifs, c’est que chacun peut y trouver son compte. Au-delà de la problématique du financement bancaire qui ne couvre pas tous les cas, le crowdlending offre une alternative au financement traditionnel en capital ou equity.

Coté entrepreneur, le dirigeant de PME n’est pas forcément en recherche de financement long-terme. Incomplétement suivi par sa banque, il ne peut ou ne veut pas offrir de caution. Par ailleurs, ouvrir son capital est une démarche lourde, complexe est engageante, impliquant un partage du pouvoir et une dilution. Enfin, nombre d’entreprises, rentables et en croissance, ne sont pas forcément formatées pour offrir les 20% de rendement annuels Rendement que rechercheront des investisseurs en action non-cotées.

Coté épargnants et investisseurs, le risque « equity » peut-être jugé inadapté. A gain potentiellement important correspond également un risque d’autant plus élevé. Par nature, un investissement en actions non-cotées se heurte également à des contraintes de liquidité et d’horizon de temps qui peuvent-être rédhibitoires. Le crédit participatif  est un support d’investissement qui même « non-secured » reste prioritaire par rapport aux actionnaires en cas de problème. Cela justifie et rend cohérente sa rémunération située entre le niveau des actions et de la dette bancaire « secured ».

Dans un environnement de taux bas et de croissance faible, le financement en « crowdlending », obligataire « non-coté », a tout pour constituer une classe d’actif à part entière. L’augmentation des seuils du « crowdlending » à 8Me par opération va dans ce sens. Il constitue une alternative en termes de financement, y compris face à l’equity. Et notamment lorsque la prise de risque impliquée ne se justifie pas de part et d’autre.

Publication originale le 17 octobre 2019, mise à jour le 8 janvier 2020

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