ISF, IFI : les raisons derrière une réforme nécessaire

ISF, IFI : les raisons derrière une réforme nécessaire

Mis à jour il y a 3 ans

Avec le remplacement du fameux ISF par l’IFI, la France espère s’aligner sur ses voisins européens et améliorer son attractivité.

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S’aligner sur l’Europe et faire face à l’exil fiscal

L’impôt sur la fortune ISF avait été instauré en 1982 par le gouvernement socialiste issu de l’élection de François Mitterrand. A l’époque dénommé IGF « Impôt sur la Grande Fortune », il présentait des taux sensiblement équivalents à ceux pratiqués récemment (entre 0,5% et 1,5%/an de la valeur nette du patrimoine). Les seuils de déclenchement ont été augmentés au fils du temps. Difficile cependant d’effectuer un comparatif pertinent malgré l’existence de l’indice de l’INSEE censé mesurer l’inflation monétaire. Cet indice de l’inflation des prix de l’INSEE ne prend pas en compte l’immobilier….

Supprimé un temps par le gouvernement de cohabitation de Jacques Chirac – ce qui lui aurait dit-on coûté l’élection présidentielle de 1988 – l’impôt sur la fortune a été rétabli et perduré jusqu’ici. Son une assiette étant fondée sur les actifs nets comprenant certaines exclusions :

  • biens professionnels,
  • œuvres d’arts, abattement pour résidence principale,
  • souscriptions loi TEPA…

Dans le même temps, les pays de l’Union Européenne ont tous supprimé les taxes sur la détention de patrimoine. L’on peut s’interroger sur les niveaux de taxation en vigueur lorsque l’on sait que les taux d’intérêt réels (rémunération sans risque corrigée de l’inflation) sont passés de l’ordre de 6% dans les années quatre-vingt à une position quasi-négative. Par ailleurs, l’ISF en France a cohabité avec d’autres types d’impôts :

  • taxe foncière,
  • droit de mutation,
  • des impôts importants sur les plus-values.

Les évolutions telles que Brexit constituent pour la France une opportunité d’attirer certaines activités à haute valeur ajoutée. Il était d’autant plus sensible de gommer les effets les plus saillants concernant l’imposition des haut revenus et patrimoine.

Mettre fin aux multiples niches fiscales et aux « effets pervers » liés à l’ISF

On pourra objecter que les personnes payant l’ISF sont celles qui ont le plus profité de l’augmentation du prix des actifs. Dans les faits, les premiers concerné, les hauts patrimoines, pouvaient échapper à cet impôt :

  • les grandes fortunes en choisissant l’exil,
  • les entrepreneurs en étant protégés par la notion de patrimoine professionnel ou de holding animatrice pour les investisseurs quasi-professionnels,
  • ou bien, tout simplement, en étant assez aisés pour ne pas dépendre de revenus réguliers et ainsi profiter du bouclier fiscal qui plafonnait la fiscalité globale à 75% des revenus déclarés.

Les patrimoines intermédiaires (cadres supérieurs) ou bien les dirigeants ayant cédé leur entreprise étaient donc principalement impactés. Or ils constituent le cœur du public et la masse à même d’investir (330.000 ménages payant en moyenne 15.000€/an d’ISF).

Face à cela ont prospéré des offres de défiscalisation qui ont réorienté des centaines de millions d’euros d’épargne chaque années via des schémas alambiqués :

  • soit dans des PME via la défiscalisation de la loi TEPA : défiscalisation à hauteur de 50% des montants investis, sortie de l’assiette ISF de l’investissement sur la durée de détention, promesse de rachat à 5 ans au minimum au conditions d’entrée. Soit un rendement implicite de base espéré supérieur à x2,
  • ou bien via des schémas immobiliers (location meublé, démembrement immobilier…).

Entre des intermédiaires qui pouvaient prélever sur la durée jusqu’à 40% des montants levé auprès des PME en frais de montage, et des souscripteurs quasiment immunisés contre le risque et principalement motivés par l’aspect fiscal et non par les fondamentaux des projets (leur plus-value étant souvent contractuellement capée par ailleurs), le système n’était pas sain.

Réorienter l’épargne vers l’économie réelle

Dans le cadre d’une réforme fiscale destinée notamment à rendre plus compétitive la tranche sur les hauts revenus (lire notre article sur la flat tax) il a finalement été décidé :

  • sinon de supprimer l’ISF – le coût politique était-il trop grand ? – du moins de le remplacer par un impôt portant uniquement sur l’assiette immobilière.
  • de repositionner la fiscalité du capital avec un prélèvement unique de 30% sur l’ensemble des flux (plus-values, intérêts, dividendes). Cette réforme participe d’un mouvement visant à réorienter l’épargne vers l’économie réelle en supprimant également de nombreuses niches.

Désormais, un prêt à une PME, par exemple via le crowdlending, sera considéré au même titre qu’un investissement « equity ». Il supportera une fiscalité  de 30% (alors que la fiscalité marginale pouvait précédemment atteindre rapidement 60% hors ISF).

Publication originale le 23 novembre 2017, mise à jour le 10 janvier 2020

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