
Mis à jour il y a 1 an
Qui n’a jamais rêvé de dénicher un Rembrant dans une brocante, d’être l’heureux propriétaire d’un vase Ming, d’un Zao Wu Ki ou du tableau « Untitled » de Jean-Michel Basquiat acheté 19 000 dollars en 1984 et revendu 110 millions de dollars en 2017… Derrière ces belles histoires, la réalité est pourtant plus complexe.
L’art peut-il être un placement ?
L’art par définition n’a pas vraiment de valeur intrinsèque, et quiconque a déjà planché sur le sujet de philo « Qu’est-ce que la valeur d’une œuvre d’art ? » pourra sans doute le confirmer. Pourtant, au-delà des goûts et des couleurs, est-il possible de considérer les œuvres d’art comme faisant partie d’une classe d’actif ?
En l’absence de comparatifs absolus (rendement, cash-flow) difficile de fixer formellement la valeur financière d’une œuvre au-delà de son aspect esthétique et des transactions comparables (la famille du docteur Rey à Arles, qui aurait utilisé le portrait réalisé par Van Gogh en guise de porte pour fermer leur poulailler n’aurait sans doute pas dit le contraire).
Il reste ainsi possible d’estimer la cote d’une œuvre en fonction de sa date, de la période, du nom de l’artiste… Des bases de données mondiales telles que celles d’Artprice répertorient ainsi les résultats des ventes aux enchères (qui ne constituent cependant qu’une partie émergée de l’iceberg). Cette société publie d’ailleurs un index permettant de donner une vision de l’évolution du marché.
Certains professionnels de l’investissement tels que The Fine Art Group se sont par ailleurs focalisés via des fonds sur ce marché. On assiste même à l’apparition de produits dérivés tels que les « art loans » (des prêts gagés sur des œuvres d’art) ou bien les « garanties » : lors de vente aux enchères : des investisseurs s’engagent à offrir une liquidité à un prix donné, ils partageront en contrepartie une partie de la plus-value avec le vendeur en cas de succès des enchères (cela permet de fluidifier les transaction en assurant au vendeur une atteinte du prix de réserve).
Difficulté et spécificité
Il n’en reste pas moins que le marché de l’art reste un marché complexe, volatile, dans lequel il est difficile de fixer de manière objective les valorisations. Il existe un fort biais statistique pour établir un état des valorisations chaque œuvre état par nature unique.
Fortement soumis aux modes, les valorisations dépendent aussi d’éléments marketing (rôle des galeries et des maisons d’enchères qui scénarisent les ventes), plus généralement d’une certaine asymétrie entre l’offre et de la demande bien entendu (rareté, présence d’un collectionneur acharné) mais également d’éléments plus subtils (provenance, artiste vivant ou non, format et taille de l’objet, œuvre unique ou série). Une anecdote de Picasso mérite réflexion : à un restaurateur qui lui avait proposé de payer son repas avec un croquis sur la nappe. Alors que ce dernier demandait une signature, l’artiste aurait rétorqué : « Je paye la note, je n’achète pas le restaurant ».
Enfin de même qu’il serait erroné d’évaluer le salaire moyen d’un footballeur sur la base des rémunérations de Neymar et MBappé, il existe une dichotomie entre les résultats records des ventes aux enchères des œuvre phares (parfois alimentées dans une certaine opacité) et la grande majorité du marché.
Même si le marché a eu tendance à progresser depuis quelques décennies, les professionnels ont en mémoire l’épisode spéculatif du début des années 90 alimenté par les acheteurs japonais, avant une chute brutale.
Au final, investir dans l’art offre des avantages…
- Accès facile, notamment via Internet,
- Produit de diversification (faible corrélation aux marchés financiers et immobiliers)
- Pas d’ISF ou d’IFI
- Placement « plaisir », statut social
… mais aussi beaucoup de contraintes :
- Frais de transaction, aussrances
- Liquidité
- Risques (traçabilité, copies)
- Absence de rendement (financier)
- Volatilité, peu de fondamentaux de valorisation
- Fiscalité
L’art est-il une classe d’actif à part entière ? Dans tous les cas, tout investissement sera à manier avec précaution. Respecter ses goûts esthétiques est sans doute la meilleure approche lors d’un achat, au pire, il sera toujours possible d’en profiter au quotidien !
Publication originale le 1 mars 2019, mise à jour le 5 octobre 2021
Sujet(s):
Epargne & Placements